Document de travail n°798 : Estimer de manière non-constante les contagions financières : une application à la transmission de chocs sur le risque de crédit

Nous proposons une nouvelle méthodologie pour estimer les contagions financières à l’aide d’une version structurelle de l’approche de Diebold-Yilmaz. Le cœur de notre approche repose sur un modèle SVAR-GARCH qui est identifié par hétéroscédasticité et par la contribution maximale des chocs, et qui permet d’obtenir des décompositions non-constantes de la variance des erreurs de prévision. Nous analysons les contagions entre les CDS souverains et bancaires de la Zone Euro. En termes de méthodologie, nous trouvons que notre modèle permet de mieux identifier les chocs par rapport aux autres approches de la littérature, et qu’il est aussi plus réactif que les modèles estimés sur fenêtres glissantes. Nous trouvons, en moyenne, que la contagion explique 37% de la variation des séries de notre échantillon, avec toutefois de fortes variations dans le temps.

Évaluer les phénomènes de contagion entre actifs financiers est un exercice difficile. Lorsque qu’un choc survient sur un marché puis se propage aux autres secteurs, l’ensemble des prix sont affectés de manière quasi-contemporaine. Par conséquent, ex post, il est ardu d’identifier la source du choc et donc de distinguer la corrélation de la causalité dans le comportement des séries financières.

De plus, l’ampleur de la transmission de ces chocs n’est pas stable durant la période observée. Par conséquent, un bon modèle de contagion doit non seulement réussir à identifier les chocs en question, mais également tenir compte d’impacts non-constants dans le temps. Plusieurs papiers dans la littérature ont proposé de résoudre ce problème en estimant leur modèle sur des fenêtres glissantes. Toutefois, cette méthodologie n’est pas satisfaisante : en procédant ainsi, les nouvelles observations n’auront que peu de poids au regard des observations passées, de sorte que le modèle manquera de réactivité.

Dans ce papier nous proposons un nouveau modèle de contagion basé sur les travaux de Diebold et Yilmaz (2009) et de Lütkepohl et Milunovich (2016). Nous estimons ce modèle sur les séries de spreads de Credit Default Swaps (CDS) souverains et bancaires de la Zone Euro. En d’autres termes, nous utilisons cette méthodologie pour évaluer la propagation nationale ou internationale de chocs sur le risque de crédit, et notamment pour analyser l’ampleur des phénomènes de contagion souverain-bancaire.

Nos principaux résultats sont d’ordre méthodologique. En comparant nos estimations avec celles d’autres modèles utilisés dans la littérature, nous observons une meilleure performance de notre méthodologie quant aux deux problématiques évoquées : l’identification des chocs et la réactivité par rapport aux nouveaux événements.

Sur l’identification des chocs tout d’abord, nous comparons la capacité qu’ont les modèles de bien distinguer les chocs bancaires des chocs souverains. Par exemple, lors de la crise politique italienne de Mai 2018, les spreads italiens de CDS bancaires et souverains ont significativement augmenté en même temps, de sorte qu’il est aisé pour un modèle de contagion de méprendre ce choc souverain pour un choc bancaire. Comme indiqué sur le graphique ci-dessous, pour cet événement particulier notre modèle (SVAR-GARCH) est le seul à bien identifier le choc. Ce même résultat est obtenu pour une vaste liste d’événements bancaires ou souverains. Sur la réactivité ensuite, nous comparons la sensibilité des modèles aux événements en effectuant des tests de causalité de Granger entre les différentes méthodologies. Il apparaît que nos estimations sont plus réactives, notamment par rapport aux modèles estimés sur fenêtres glissantes.

Nous présentons par ailleurs des résultats économiques qui corroborent notre stratégie d’identification. En effet, d’une part lorsqu’on observe les indices de contagion de notre modèle, ces derniers retracent précisément la crise de la Zone Euro, et soulignent l’importance des chocs irlandais en début de période, puis la montée en puissance des chocs italiens et espagnols. D’autre part, les estimations de contagion obtenues sont positivement associées aux canaux de transmission du risque de crédit recensés par la littérature théorique et empirique.

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Document de travail n°798 : Estimer de manière non-constante les contagions financières : une application à la transmission de chocs sur le risque de crédit
  • Publié le 05/01/2021
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Mis à jour le : 05/01/2021 13:43