Le Bulletin de la Banque de France n°217 : Article 2 Négociation salariale en Europe : des modèles différents, de plus en plus décentralisés depuis la crise

Il n’existe pas de modèle européen unique de la négociation salariale. Elle s’effectue entre partenaires sociaux au niveau national ou régional dans les pays nordiques. C’est aussi le cas en Allemagne malgré une décentralisation des négociations salariales au niveau des branches et des entreprises amorcée au début des années 2000. En Belgique, en Espagne, voire en Italie, le gouvernement intervient parfois fortement dans les négociations. La France et le Portugal connaissent un niveau de négociation moins centralisé, mais le salaire minimum, fixé par le gouvernement, peut avoir un impact important sur les salaires négociés.

Depuis la crise, on constate une tendance générale à la décentralisation de la négociation, permettant une meilleure adaptation des entreprises à la situation économique.

Graphique : fréquence de modification des conventions collectives salariales dans les entreprises

Des situations différentes en Europe malgré une tendance générale à la décentralisation et à la modération salariale pendant la crise

Les modes de négociation salariale diffèrent en Europe selon deux critères : l’importance accordée à la négociation par rapport aux normes légales et règlementaires ou aux stipulations du contrat de travail ; et le degré de centralisation 1, c’est-à-dire le niveau de négociation prédominant (national, sectoriel ou d’entreprise)

Divers modes de négociations salariales en Europe

En Europe, l’influence des gouvernements sur la négociation salariale varie fortement : elle est nulle au Royaume-Uni, mais particulièrement forte en Belgique où une loi encadre l’évolution des salaires. Dans les pays où la négociation est centralisée (Allemagne, Pays-Bas, Suède), la loi fixe un cadre institutionnel pour la consultation des partenaires sociaux. En France ou au Portugal, la négociation se déroule à un niveau moins centralisé mais les évolutions du salaire minimum influent sur la fixation des minima de branche. Ainsi, Fougère, Gautier et Roux (2016) estiment l’élasticité des minima de branche à la hausse du SMIC comprise entre 0,15 % et 0,4 %, de moins en moins forte à mesure que les salaires sont élevés.

Une tendance européenne à la décentralisation des négociations

S’il n’y a pas de modèle unique, une tendance commune à la décentralisation de la négociation est apparue lors de la crise avec pour objectif une meilleure adaptation du droit conventionnel – issu des conventions collectives – à la situation des entreprises. Notamment, les négociations de branche ont été plus encadrées, tandis que les accords d’entreprise ont été assouplis. Par exemple, en Espagne depuis 2012, les conventions collectives d’entreprise ont désormais la priorité sur les conventions de niveau supérieur pour tous les sujets relevant de l’article 84.2 du statut des travailleurs (salaire de base et compléments, compensation des heures supplémentaires, horaires de travail, classification professionnelle, adaptation du contrat de travail et mesures de conciliation familiale).

La décentralisation de la négociation collective vers l’entreprise se double d’un mouvement de renforcement de la flexibilité interne, notamment pour prévenir des difficultés économiques : possibilité de flexibilité horaire ou de modification unilatérale des contrats en cas de situation difficile pour l’entreprise, dans le respect des standards minimaux fixés par les conventions collectives.

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Le Bulletin de la Banque de France n°217 : Négociation salariale en Europe : des modèles différents, de plus en plus décentralisés depuis la crise
  • Publié le 07/06/2018
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Macroéconomie, microéconomie et structures

Mis à jour le : 30/10/2019 17:17