Lors de sa réunion de politique monétaire du 13 septembre, le Conseil des gouverneurs a conclu que les informations disponibles, provenant notamment des projections macroéconomiques de septembre 2018 établies par les services de la BCE, confirment globalement l’évaluation faite précédemment par le Conseil des gouverneurs d’une poursuite de la croissance généralisée de l’économie de la zone euro et d’une accélération graduelle de l’inflation. La vigueur sous-jacente de l’économie continue d’étayer la confiance du Conseil des gouverneurs dans la poursuite de la convergence durable de l’inflation vers son objectif au cours de la période à venir, au-delà même de la réduction progressive des achats nets d’actifs. Cela étant, les incertitudes concernant la montée du protectionnisme, les vulnérabilités sur les marchés émergents et la volatilité des marchés financiers se sont accrues récemment. Par conséquent, un niveau significatif de stimulus monétaire reste nécessaire pour soutenir la poursuite du renforcement des tensions domestiques sur les prix et de l’inflation totale à moyen terme. Ce soutien continuera d’être apporté par les achats nets d’actifs jusqu’à la fin de l’année, par le volume considérable de titres acquis et les réinvestissements associés ainsi que par les indications approfondies du Conseil des gouverneurs sur la trajectoire future des taux d’intérêt directeurs de la BCE (enhanced forward guidance). En tout état de cause, le Conseil des gouverneurs se tient prêt à ajuster l’ensemble de ses instruments de façon appropriée pour assurer le rapprochement durable de l’inflation de son objectif.
L’économie mondiale a maintenu un rythme régulier au premier semestre 2018, mais cette dynamique devrait se ralentir. Les économies avancées bénéficient toujours de politiques monétaires accommodantes et de la relance budgétaire aux États-Unis, tandis que l’activité des exportateurs de matières premières a également été soutenue par le redressement des prix des matières premières au cours de l’année passée. Toutefois, les conditions financières se sont durcies, notamment pour certains marchés émergents. En outre, la croissance du commerce mondial s’est ralentie et les incertitudes entourant les futures relations commerciales se sont accrues. À moyen terme, l’activité économique mondiale devrait progresser à un rythme proche de la croissance potentielle, les écarts de production étant déjà comblés ou sur le point de l’être dans la plupart des économies avancées. Les tensions inflationnistes mondiales devraient lentement se renforcer parallèlement à la diminution des capacités inutilisées.
Sur les marchés financiers, les taux sans risque à long terme dans la zone euro sont restés globalement inchangés depuis la réunion du Conseil des gouverneurs de juin 2018. Les écarts de rendement des obligations souveraines ont été volatils dans un contexte de persistance de l’incertitude politique en Italie. Même si les bénéfices des entreprises restent solides, les prix des actions et des obligations des sociétés financières de la zone euro ont diminué sur fond d’incertitude géopolitique et de hausse de la volatilité sur certains marchés émergents. Sur les marchés des changes, l’euro s’est globalement renforcé en termes pondérés des échanges commerciaux.
Les derniers indicateurs économiques et résultats d’enquêtes confirment une poursuite de la croissance généralisée de l’économie de la zone euro, en dépit d’un certain ralentissement par rapport à la forte croissance observée en 2017. Le PIB en volume de la zone euro a crû de 0,4 %, en rythme trimestriel, au deuxième trimestre 2018, soit au même rythme qu’au trimestre précédent. Les mesures de politique monétaire de la BCE continuent de soutenir la demande intérieure. La consommation privée est confortée par la poursuite des créations d’emplois, qui reflètent en partie les réformes passées des marchés du travail, ainsi que par l’augmentation des salaires. L’investissement des entreprises est soutenu par les conditions de financement favorables, la hausse de leur rentabilité et une forte demande. L’investissement immobilier résidentiel reste robuste. De plus, la croissance de l’activité mondiale devrait se poursuivre et favoriser les exportations de la zone euro.
Les projections macroéconomiques de septembre 2018 établies par les services de la BCE pour la zone euro tablent sur une croissance annuelle du PIB en volume de 2,0 % en 2018, 1,8 % en 2019 et 1,7 % en 2020. Par rapport aux projections macroéconomiques de juin 2018 établies par les services de l’Eurosystème, les perspectives de croissance du PIB en volume ont été révisées légèrement à la baisse pour 2018 et 2019, principalement en raison d’une contribution plus faible de la demande extérieure. Bien que les risques liés à la montée du protectionnisme, aux vulnérabilités sur les marchés émergents et à la volatilité des marchés financiers se soient accrus récemment, les risques pesant sur les perspectives de croissance de la zone euro peuvent encore être considérés comme globalement équilibrés.
Selon l’estimation rapide d’Eurostat, la hausse annuelle de l’IPCH dans la zone euro s’est établie à 2,0 % en août 2018, contre 2,1 % en juillet. Sur la base des prix actuels des contrats à terme sur le pétrole, les taux annuels d’inflation devraient fluctuer autour de leurs niveaux actuels jusqu’à la fin de l’année. Si les mesures de l’inflation sous-jacente restent globalement modérées, elles ont augmenté par rapport aux points bas passés. Les tensions d’origine interne sur les coûts s’accentuent et se généralisent dans un contexte de niveaux élevés d’utilisation des capacités de production et de tensions sur les marchés du travail qui alimentent la hausse des salaires. L’inflation sous-jacente devrait s’accélérer vers la fin de l’année et augmenter graduellement à moyen terme, soutenue par les mesures de politique monétaire de la BCE, la poursuite de la croissance économique et l’accélération de la hausse des salaires.
Ce scénario ressort également, globalement, des projections macroéconomiques de septembre 2018 établies par les services de la BCE pour la zone euro, qui tablent sur une hausse annuelle de l’IPCH de 1,7 % en 2018, 2019 et 2020. Les perspectives de hausse de l’IPCH sont inchangées par rapport aux projections macroéconomiques de juin 2018 établies par les services de l’Eurosystème. La hausse de l’IPCH hors énergie et produits alimentaires devrait s’accélérer progressivement pour passer de 1,1 % en 2018 à 1,5 % en 2019 et à 1,8 % en 2020.
L’orientation budgétaire au niveau agrégé pour la zone euro devrait être globalement neutre en 2018, faiblement expansionniste en 2019 et à nouveau globalement neutre en 2020. Globalement, le déficit budgétaire de la zone euro devrait continuer de se réduire sur l’horizon de projection, essentiellement sous l’effet de conditions conjoncturelles propices et d’une diminution des paiements d’intérêts. Le ratio dette publique/PIB de la zone euro va continuer de diminuer, mais demeurera élevé.
La croissance de la monnaie au sens large (M3) s’est ralentie dans le contexte de réduction des achats nets d’actifs mensuels au titre du programme d’achats d’actifs (APP). La croissance de M3 s’est établie à 4,0 % en juillet 2018, après 4,5 % en juin. L’expansion de M3, en dehors d’une certaine volatilité des flux mensuels, est de plus en plus soutenue par la création de crédit par les banques. L’agrégat monétaire étroit M1 a continué d’apporter la principale contribution à la croissance de la monnaie au sens large. La hausse des prêts accordés au secteur privé constatée depuis début 2014 se poursuit. Le taux de croissance annuel des prêts aux sociétés non financières (SNF) s’est établi à 4,1 % en juillet 2018, et celui des prêts aux ménages à 3,0 %, dans les deux cas sans changement par rapport à juin. Les effets des mesures de politique monétaire en place depuis juin 2014 continuent de soutenir fortement les conditions d’emprunt des entreprises et des ménages, l’accès au financement (en particulier pour les petites et moyennes entreprises) et les flux de crédits dans la zone euro. Le flux du financement externe total à destination des SNF de la zone euro a considérablement augmenté au deuxième trimestre 2018.
Au terme de l’examen régulier de la situation économique et monétaire, le Conseil des gouverneurs a pris les décisions suivantes. Premièrement, le Conseil des gouverneurs a décidé de laisser les taux d’intérêt directeurs de la BCE inchangés et continue de prévoir qu’ils resteront à leurs niveaux actuels au moins jusqu’à l’été 2019 et, en tout cas, aussi longtemps que nécessaire pour assurer la poursuite de la convergence durable de l’inflation vers des niveaux inférieurs à, mais proches de 2 % à moyen terme. Deuxièmement, le Conseil des gouverneurs continuera de procéder à des achats nets dans le cadre du programme d’achats d’actifs (asset purchase programme – APP) au rythme mensuel actuel de 30 milliards d’euros jusqu’à fin septembre 2018. Après septembre 2018, le rythme mensuel des achats nets d’actifs sera réduit à 15 milliards d’euros jusqu’à fin décembre 2018. Le Conseil des gouverneurs prévoit que, si les données lui parvenant confirment ses perspectives d’inflation à moyen terme, les achats nets arriveront alors à leur terme. Troisièmement, le Conseil des gouverneurs entend procéder au réinvestissement des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans le cadre de l’APP pendant une période prolongée après la fin des achats nets d’actifs et, en tout cas, aussi longtemps que nécessaire pour maintenir des conditions de liquidité favorables et un degré élevé de soutien monétaire.
Updated on: 09/27/2018 10:01