Au terme d’une évaluation approfondie des perspectives économiques et d’inflation, en tenant compte également des dernières projections macroéconomiques établies par les services de l’Eurosystème pour la zone euro, le Conseil des gouverneurs a pris une série de décisions de politique monétaire lors de sa réunion de politique monétaire du 6 juin afin de favoriser la convergence de l’inflation vers des niveaux inférieurs à, mais proches de 2 %. En dépit de données légèrement plus favorables qu’attendu concernant le premier trimestre, les informations les plus récentes signalent que les conditions défavorables au niveau mondial continuent d’affaiblir les perspectives pour la zone euro. La persistance des incertitudes, liées aux facteurs géopolitiques, à la montée de la menace protectionniste et aux vulnérabilités sur les marchés émergents, influe sur le climat économique. Dans le même temps, de nouvelles créations d’emplois et l’augmentation des salaires continuent de soutenir la capacité de résistance de l’économie de la zone euro et le renforcement progressif de l’inflation. Dans ce contexte général, le Conseil des gouverneurs a décidé de ne pas modifier les taux d’intérêt directeurs de la BCE et d’ajuster sa forward guidance en conséquence pour indiquer qu'il prévoit le maintien de ces taux à leurs niveaux actuels au moins pendant le premier semestre 2020 et, en tout cas, aussi longtemps que nécessaire pour assurer la poursuite de la convergence durable de l’inflation vers des niveaux inférieurs à, mais proches de 2 % à moyen terme. Il a également réaffirmé ses indications sur les réinvestissements. Enfin, il a décidé des modalités de la nouvelle série d’opérations trimestrielles de refinancement à plus long terme ciblées (targeted longer-term refinancing operations – TLTRO III), notamment des taux qui leur seront appliqués. Le Conseil des gouverneurs a également estimé que, à ce stade, la contribution positive des taux d’intérêt négatifs à l’orientation accommodante de la politique monétaire et à la convergence durable de l’inflation n’est pas compromise par leurs éventuels effets secondaires sur l’intermédiation bancaire. Toutefois, le Conseil des gouverneurs continue de surveiller de près le canal de transmission bancaire de la politique monétaire et d’étudier les arguments en faveur de mesures compensatrices.
La dynamique de fond de la croissance mondiale a continué de se modérer début 2019, en dépit de données meilleures que prévu dans certaines grandes économies avancées. Les indicateurs tirés d’enquêtes signalent une faiblesse persistante de l’activité mondiale dans le secteur manufacturier, en dépit d’une récente stabilisation à de bas niveaux, ainsi qu’une détérioration récente de l’activité dans le secteur des services, après une période de relative résistance. La croissance mondiale devrait se ralentir cette année, dans un contexte caractérisé par un niveau élevé et croissant d’incertitude politique et d’incertitude relative à la politique économique, qui pèse sur l’investissement, et par une nouvelle intensification des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine. Même si ces facteurs défavorables devraient continuer de peser sur l’activité et le commerce au niveau mondial cette année, les mesures prises récemment devraient apporter un soutien par la suite. Par conséquent, la croissance mondiale devrait se modérer en 2019, avant de se stabiliser à moyen terme. Le commerce mondial devrait se ralentir plus fortement cette année et augmenter en phase avec l’activité économique à moyen terme. Les tensions inflationnistes mondiales devraient demeurer contenues, tandis que les risques orientés à la baisse qui pèsent sur l’activité mondiale se sont intensifiés.
Les taux sans risque à long terme ont baissé depuis la réunion du Conseil des gouverneurs de mars 2019, dans un contexte d’anticipation par les marchés d’une poursuite de la politique monétaire accommodante et de résurgence des tensions commerciales. Les prix des actions des sociétés non financières ont légèrement augmenté, affichant une certaine volatilité, soutenus par de faibles taux sans risque et par l’amélioration des anticipations relatives aux bénéfices. Toutefois, l’incertitude liée à la résurgence des tensions commerciales pèse sur les prix des actifs risqués. Sur les marchés des changes, l’euro s’est globalement apprécié en termes pondérés des échanges commerciaux.
La croissance du PIB en volume de la zone euro s’est accentuée au premier trimestre 2019, ressortant à 0,4 % en rythme trimestriel, après le ralentissement observé au second semestre de l’année dernière dans un contexte d’affaiblissement de la demande extérieure. Toutefois, les données économiques et les résultats d’enquêtes devenus disponibles indiquent un léger essoufflement de la croissance au deuxième et au troisième trimestre de cette année. Cela reflète la faiblesse actuelle du commerce international dans un contexte de persistance des incertitudes au niveau mondial, qui pèsent notamment sur le secteur manufacturier de la zone euro. Dans le même temps, les secteurs des services et de la construction résistent bien, et la situation sur les marchés du travail continue de s’améliorer. Au cours des prochains mois, l’expansion de la zone euro restera soutenue par les conditions de financement favorables, par l’orientation budgétaire légèrement expansionniste, par de nouvelles créations d’emplois et par la hausse des salaires ainsi que par la poursuite, à un rythme un peu plus faible cependant, de la croissance de l’activité mondiale.
Cette évaluation se reflète globalement dans les projections macroéconomiques de juin 2019 établies par les services de l’Eurosystème pour la zone euro. Ces projections tablent sur une croissance annuelle du PIB en volume de 1,2% en 2019, 1,4% en 2020 et 1,4% en 2021. Par rapport aux projections macroéconomiques de mars 2019 établies par les services de la BCE, les perspectives de croissance du PIB en volume ont été revues, en hausse de 0,1 point de pourcentage pour 2019 et en baisse de 0,2 point de pourcentage pour 2020 et de 0,1 point pour 2021. Les risques pesant sur les perspectives de croissance de la zone euro restent orientés négativement, en raison de la persistance des incertitudes liées aux facteurs géopolitiques, à la menace protectionniste croissante et aux vulnérabilités sur les marchés émergents.
Selon l’estimation rapide d’Eurostat, la hausse annuelle de l’IPCH dans la zone euro s’est établie à 1,2 % en mai 2019, contre 1,7 % en avril, en raison principalement d’une hausse plus faible des prix de l’énergie et des services. Sur la base des prix actuels des contrats à terme sur le pétrole, l’inflation totale devrait se ralentir au cours des prochains mois, avant de s’accélérer à nouveau vers la fin de l’année. Les mesures de l’inflation sous-jacente restent globalement modérées, mais les tensions sur les coûts de main-d’œuvre continuent de s’accentuer et de se généraliser dans un contexte de niveaux élevés d’utilisation des capacités de production et de tensions sur les marchés du travail. L’inflation sous-jacente devrait s’accélérer progressivement à moyen terme, soutenue par les mesures de politique monétaire de la BCE, par la croissance économique en cours et par le renforcement de la hausse des salaires.
C’est ce qui ressort aussi globalement des projections macroéconomiques de juin 2019 établies par les services de l’Eurosystème pour la zone euro, qui prévoient une hausse annuelle de l’IPCH de 1,3 % en 2019, de 1,4 % en 2020 et de 1,6 % en 2021. Par comparaison avec les projections de mars 2019 réalisées par les services de la BCE, les perspectives de l’inflation mesurée par l’IPCH ont été revues, à la hausse de 0,1 point de pourcentage pour 2019 et à la baisse de 0,1 point de pourcentage pour 2020. La hausse annuelle de l’IPCH hors énergie et produits alimentaires devrait s’établir à 1,1 % en 2019, 1,4 % en 2020 et 1,6 % en 2021.
La croissance annuelle de la monnaie au sens large et des prêts au secteur privé s’est accentuée en avril 2019. La croissance de la monnaie au sens large (M3) s’est établie à 4,7 % en avril 2019, après 4,6 % en mars. Les taux de croissance soutenus de l’agrégat monétaire large traduisent la poursuite de la création de crédit bancaire à destination du secteur privé et la faiblesse des coûts d’opportunité de la détention de M3. De plus, la croissance de M3 a continué de faire preuve de résistance face à la diminution progressive de la contribution mécanique des achats nets réalisés dans le cadre du programme d’achats d’actifs (asset purchase programme – APP). Dans le même temps, les conditions d’octroi de crédits sont demeurées favorables ; le taux de croissance annuel des prêts aux sociétés non financières a augmenté, passant à 3,9 % en avril 2019, après 3,6 % en mars. Les mesures de politique monétaire adoptées par le Conseil des gouverneurs, y compris les TLTRO III, contribueront à préserver les conditions favorables d’octroi de crédits bancaires et continueront de soutenir l’accès au financement, en particulier pour les petites et moyennes entreprises.
L’orientation budgétaire au niveau agrégé pour la zone euro devrait demeurer faiblement expansionniste, apportant ainsi un soutien à l’activité économique. Ce profil s’explique principalement par des réductions de la fiscalité directe et des contributions à la sécurité sociale en Allemagne et en France, mais également par une croissance relativement dynamique des dépenses dans plusieurs autres pays.
Au terme de l’examen régulier de la situation économique et monétaire, le Conseil des gouverneurs a pris les décisions suivantes :
Les décisions adoptées visent à apporter le soutien monétaire nécessaire pour que l’inflation continue de suivre une trajectoire durable vers des niveaux inférieurs à, mais proches de 2 % à moyen terme. En effet, elles permettent de garantir que les conditions financières demeureront très favorables, soutenant l’expansion de la zone euro, la poursuite du développement des tensions domestiques sur les prix et, donc, l’évolution de l’inflation totale à moyen terme. Dans le même temps, pour la période à venir, le Conseil des gouverneurs est déterminé à agir en cas d’évolutions défavorables et se tient prêt également à ajuster l’ensemble de ses instruments de façon adéquate pour assurer que l’inflation continue de se rapprocher durablement de son objectif.
Updated on: 06/20/2019 10:00