Les perspectives d’inflation demeurent trop élevées sur une période trop longue. Compte tenu de la persistance de fortes pressions inflationnistes, le Conseil des gouverneurs a décidé, lors de sa réunion du 4 mai 2023, d’augmenter les trois taux d’intérêt directeurs de la BCE de 25 points de base. Les informations disponibles confirment globalement l’évaluation des perspectives d’inflation à moyen terme établie par le Conseil des gouverneurs lors de sa dernière réunion de politique monétaire qui s’est tenue le 16 mars. L’inflation totale a reculé au cours des derniers mois, mais les tensions sous-jacentes sur les prix restent fortes. Parallèlement, la transmission des précédentes hausses des taux aux conditions monétaires et de financement dans la zone euro est vigoureuse, bien que les délais et la force de la transmission à l’économie réelle restent incertains.
Les décisions futures du Conseil des gouverneurs feront en sorte que les taux directeurs soient fixés à des niveaux suffisamment restrictifs pour assurer un retour au plus tôt de l’inflation au niveau de son objectif de 2 % à moyen terme, et qu’ils soient maintenus à ces niveaux aussi longtemps que nécessaire. Le Conseil des gouverneurs maintiendra une approche s’appuyant sur les données pour déterminer de manière appropriée le degré et la durée de cette orientation restrictive. Plus particulièrement, les décisions relatives aux taux directeurs resteront basées sur l’évaluation par le Conseil des gouverneurs des perspectives d’inflation compte tenu des données économiques et financières, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire.
Les taux d’intérêt directeurs de la BCE demeurent le principal instrument du Conseil des gouverneurs pour définir l’orientation de la politique monétaire. Par ailleurs, le Conseil des gouverneurs poursuivra la réduction du portefeuille de titres détenus par l’Eurosystème dans le cadre du programme d’achats d’actifs (asset purchase programme, APP) à un rythme mesuré et prévisible. En ce sens, le Conseil des gouverneurs prévoit de mettre fin aux remboursements au titre de l’APP à compter de juillet 2023.
L’activité économique mondiale a été plus soutenue que prévu début 2023. L’économie mondiale a été soutenue par la réouverture de l’économie de la Chine après l’abandon de sa politique zéro COVID, ainsi que par la bonne tenue du marché du travail aux États-Unis – en dépit du resserrement significatif de la politique monétaire. Toutefois, le commerce est demeuré atone, la reprise de l’activité se concentrant sur les composantes de la demande moins dépendantes des échanges commerciaux, telles que les services. L’inflation totale mondiale a continué de se ralentir, tandis que l’inflation sous-jacente (core) est demeurée à des niveaux élevés.
La croissance de l’économie de la zone euro s’est établie à 0,1 % au premier trimestre 2023, selon l’estimation rapide préliminaire d’Eurostat. La baisse des prix de l’énergie, l’assouplissement des goulets d’étranglement au niveau de l’offre et les mesures budgétaires destinées à aider les entreprises et les ménages ont contribué à la résilience de l’économie. Dans le même temps, la demande intérieure privée, plus particulièrement la consommation, est vraisemblablement restée atone.
La confiance des entreprises et des consommateurs s’est redressée régulièrement ces derniers mois, mais elle reste en deçà des niveaux observés avant la guerre injustifiée de la Russie contre l’Ukraine et sa population. Le Conseil des gouverneurs constate une divergence entre les différents secteurs de l’économie. Le secteur manufacturier résorbe des arriérés de commandes, mais ses perspectives se dégradent. La croissance des services est plus robuste, en raison notamment de la réouverture de l’économie.
Les revenus des ménages bénéficient de la vigueur du marché du travail, le taux de chômage atteignant un nouveau point bas historique de 6,5 % en mars. La croissance de l’emploi s’est poursuivie, et le nombre total d’heures travaillées dépasse les niveaux d’avant la pandémie. Dans le même temps, le nombre moyen d’heures travaillées reste légèrement inférieur à son niveau d’avant la pandémie, sans rebond notable depuis mi-2022.
Alors que la crise de l’énergie s’estompe, les pouvoirs publics devraient retirer rapidement et de manière concertée les mesures de soutien correspondantes afin d’éviter d’accentuer les pressions inflationnistes à moyen terme, ce qui exigerait une réponse de politique monétaire plus forte. Les politiques budgétaires doivent viser à améliorer la productivité de l’économie de la zone euro et à réduire progressivement les niveaux élevés de dette publique. Les mesures prises pour renforcer la capacité d’offre de la zone euro, en particulier dans le secteur de l’énergie, peuvent également contribuer à soulager les tensions sur les prix à moyen terme. À cet égard, le Conseil des gouverneurs accueille favorablement la publication, par la Commission européenne, des propositions législatives pour la réforme du cadre de gouvernance économique de l’Union européenne, qui devrait être achevée sous peu.
Selon l’estimation rapide d’Eurostat, l’inflation s’est établie à 7,0 % en avril, après être revenue de 8,5 % en février à 6,9 % en mars. Bien que des effets de base aient contribué à une accélération de la hausse des prix de l’énergie, de – 0,9 % en mars à 2,5 % en avril, ce taux reste largement inférieur à ceux qui avaient été enregistrés après le début de la guerre de la Russie contre l’Ukraine. La hausse des prix des produits alimentaires reste toutefois élevée, à 13,6 % en avril contre 15,5 % en mars.
Les tensions sur les prix demeurent fortes. L’inflation hors produits alimentaires et énergie était de 5,6 % en avril, se ralentissant quelque peu par rapport à mars pour revenir à son niveau de février. La hausse des prix des biens industriels non énergétiques est revenue à 6,2 % en avril, après 6,6 % en mars, où elle s’était ralentie pour la première fois depuis plusieurs mois. Mais la hausse des prix des services s’est accélérée, ressortant à 5,2 % en avril, après 5,1 % en mars. L’inflation reste poussée à la hausse par les répercussions progressives des hausses des coûts de l’énergie et des goulets d’étranglement du côté de l’offre observés antérieurement. Dans les services, en particulier, elle demeure aussi portée par la demande latente liée à la réouverture de l’économie et par la croissance des salaires. Les informations disponibles jusqu’en mars suggèrent que les indicateurs de l’inflation sous-jacente restent élevés.
Les pressions salariales se sont accentuées, les salariés retrouvant, dans un marché du travail robuste, une partie du pouvoir d’achat perdu sous l’effet de la forte inflation. De plus, dans certains secteurs, les entreprises ont pu accroître leurs marges bénéficiaires grâce à l’inadéquation entre l’offre et la demande et à l’incertitude créée par l’inflation élevée et volatile. Si la plupart des mesures des anticipations d’inflation à long terme s’établissent actuellement à environ 2 %, l’augmentation de certains indicateurs justifie un suivi continu.
Le regain des tensions sur les marchés financiers, s’il persiste, ferait peser un risque à la baisse sur les perspectives de croissance, car il pourrait resserrer les conditions du crédit plus sévèrement qu’anticipé et entamer la confiance. La guerre menée par la Russie contre l’Ukraine continue aussi de représenter un risque baissier important pour l’économie. L’inversion récente des chocs d’offre défavorables passés pourrait toutefois, si elle se prolonge, stimuler la confiance et soutenir une croissance plus forte que prévu actuellement. La résilience continue du marché du travail, en soutenant la confiance et la consommation des ménages, pourrait également se traduire par une croissance plus vive qu’anticipé.
Des risques à la hausse significatifs continuent de peser sur les perspectives d’inflation, tenant notamment aux tensions existantes en amont qui pourraient entraîner une augmentation plus forte que prévu des prix de détail à court terme. Par ailleurs, la guerre de la Russie contre l’Ukraine pourrait à nouveau provoquer une hausse des coûts de l’énergie et des produits alimentaires. Une augmentation durable des anticipations d’inflation au-delà de l’objectif du Conseil des gouverneurs, ou des hausses de salaire ou des marges bénéficiaires plus importantes qu’anticipé pourraient aussi alimenter une accélération de l’inflation, y compris à moyen terme. Les accords salariaux conclus récemment renforcent les risques à la hausse sur l’inflation, en particulier si les marges bénéficiaires restent élevées. Les risques à la baisse tiennent quant à eux notamment à un regain des tensions sur les marchés financiers, qui pourrait se traduire par un ralentissement de l’inflation plus rapide que prévu. Une contraction de la demande, découlant par exemple d’un ralentissement plus net de l’activité de prêt bancaire ou d’une transmission plus forte de la politique monétaire, exercerait aussi une pression sur les prix moindre qu’anticipé actuellement, à moyen terme en particulier.
Le secteur bancaire de la zone euro a su résister aux tensions sur les marchés financiers qui avaient émergé avant la réunion du Conseil des gouverneurs de mars. Les relèvements des taux directeurs par le Conseil des gouverneurs sont transmis fortement aux taux d’intérêt sans risques et aux conditions de financement des entreprises, des ménages et des banques. Pour les entreprises et les ménages, la croissance des prêts s’est ralentie du fait des taux d’emprunt plus élevés, du durcissement des conditions d’offre de crédit et de la baisse de la demande. La dernière enquête sur la distribution du crédit bancaire dans la zone euro a signalé un resserrement global de ces critères, plus net qu’anticipé par les banques lors de la précédente enquête, ce qui suggère un possible nouveau tassement des prêts à venir. Sous l’effet de cette faible activité de prêt, la croissance monétaire s’est également ralentie.
Lors de sa réunion du 4 mai 2023, le Conseil des gouverneurs a décidé d’augmenter les trois taux d’intérêt directeurs de la BCE de 25 points de base. Dès lors, les taux d’intérêt des opérations principales de refinancement, de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt ont été relevés à, respectivement, 3,75 %, 4,00 % et 3,25 % à compter du 10 mai 2023.
Le portefeuille de l’APP est réduit à un rythme mesuré et prévisible, l’Eurosystème ne réinvestissant pas la totalité des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance. Cette phase de contraction, à hauteur de 15 milliards d’euros par mois en moyenne, s’achèvera fin juin 2023. Le Conseil des gouverneurs prévoit de mettre fin aux réinvestissements au titre de l’APP à compter de juillet 2023.
S’agissant du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (pandemic emergency purchase programme, PEPP), le Conseil des gouverneurs entend réinvestir les remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans le cadre du programme au moins jusqu’à la fin de 2024. Dans tous les cas, le futur dénouement du portefeuille PEPP sera géré de façon à éviter toute interférence avec l’orientation adéquate de la politique monétaire.
Le Conseil des gouverneurs continuera de faire preuve de flexibilité dans le réinvestissement des remboursements des titres arrivant à échéance détenus dans le portefeuille du PEPP, afin de contrer les risques liés à la pandémie qui pèsent sur le mécanisme de transmission de la politique monétaire.
À mesure du remboursement par les banques des montants empruntés dans le cadre des opérations de refinancement à plus long terme ciblées, le Conseil des gouverneurs évaluera régulièrement la contribution des opérations de prêt ciblées à son orientation de politique monétaire.
En résumé, les perspectives d’inflation demeurent trop élevées sur une période trop longue. Compte tenu de la persistance de fortes pressions inflationnistes, le Conseil des gouverneurs a décidé, lors de sa réunion du 4 mai 2023, d’augmenter les trois taux d’intérêt directeurs de la BCE de 25 points de base. Les informations disponibles confirment globalement l’évaluation des perspectives d’inflation à moyen terme établie par le Conseil des gouverneurs lors de sa dernière réunion de politique monétaire qui s’est tenue le 16 mars. L’inflation a reculé au cours des derniers mois, mais les tensions sous-jacentes sur les prix restent fortes. Parallèlement, la transmission des précédentes hausses des taux aux conditions monétaires et de financement dans la zone euro est vigoureuse, bien que les délais et la force de la transmission à l’économie réelle restent incertains.
Les décisions futures du Conseil des gouverneurs feront en sorte que les taux directeurs soient fixés à des niveaux suffisamment restrictifs pour assurer un retour au plus tôt de l’inflation au niveau de son objectif de 2 % à moyen terme, et qu’ils soient maintenus à ces niveaux aussi longtemps que nécessaire. Le Conseil des gouverneurs maintiendra une approche s’appuyant sur les données pour déterminer de manière appropriée le degré et la durée de cette orientation restrictive. Plus particulièrement, les décisions relatives aux taux directeurs resteront basées sur l’évaluation par le Conseil des gouverneurs des perspectives d’inflation compte tenu des données économiques et financières, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire.
En toute hypothèse, le Conseil des gouverneurs se tient prêt à ajuster l’ensemble de ses instruments, dans le cadre de son mandat, pour assurer le retour de l’inflation au niveau de son objectif à moyen terme et pour préserver une bonne transmission de la politique monétaire.
Updated on: 05/19/2023 10:00