Les informations disponibles depuis la réunion du Conseil des gouverneurs du 14 juin indiquent la poursuite d’une croissance solide et généralisée de l’économie de la zone euro [1]. Les incertitudes liées aux facteurs mondiaux, notamment la menace protectionniste, demeurent fortes et le risque d’une élévation persistante de la volatilité des marchés financiers doit toujours être surveillé. Toutefois, les risques pesant sur les perspectives de croissance de la zone euro peuvent encore être considérés comme globalement équilibrés. La vigueur sous-jacente de l’économie étaye la confiance du Conseil des gouverneurs dans la poursuite de la convergence durable de l’inflation vers son objectif au cours de la période à venir, au-delà même de la réduction progressive des achats nets d’actifs. Néanmoins, un niveau significatif de relance monétaire reste nécessaire pour soutenir le maintien du renforcement des tensions domestiques sur les prix et de l’inflation totale à moyen terme. Ce soutien continuera d’être apporté par les achats nets d’actifs jusqu’à la fin de l’année, par le volume considérable de titres acquis et les réinvestissements associés ainsi que par les indications approfondies du Conseil des gouverneurs sur la trajectoire future des taux d’intérêt directeurs de la BCE (forward guidance). En tout état de cause, le Conseil des gouverneurs se tient prêt à ajuster l’ensemble de ses instruments, le cas échéant, pour assurer le rapprochement durable de l’inflation par rapport à son objectif.
La dynamique de croissance de l’économie mondiale s’est maintenue à un rythme stable au deuxième trimestre 2018, mais les risques à la baisse liés aux droits de douane sont demeurés importants. En outre, les indicateurs du commerce mondial ont perdu de leur vigueur. Les conditions financières se sont légèrement durcies dans les économies de marché émergentes, mais demeurent globalement favorables dans les économies avancées.
Dans la zone euro, les rendements des obligations souveraines ont diminué depuis la réunion du 14 juin, en raison d’une moindre volatilité sur les marchés de la dette souveraine et de la baisse des taux sans risque. Les prix des actions ont subi une correction dans un contexte d’intensification des tensions commerciales. Sur les marchés des changes, l’euro s’est globalement apprécié en termes pondérés des échanges commerciaux.
Les derniers indicateurs économiques se sont stabilisés et continuent de faire état d’une croissance solide et généralisée, à un rythme cependant moins élevé qu’en 2017. Cette modération reflète un recul par rapport aux niveaux très élevés de croissance enregistrés en 2017 et résulte principalement d’une plus faible contribution des échanges commerciaux, très dynamiques jusqu’alors, accentuée par une hausse de l’incertitude et certains facteurs temporaires et d’offre, au niveau tant domestique que mondial. La consommation privée continue d’être confortée par la poursuite des créations d’emplois, qui reflètent partiellement les réformes passées des marchés du travail, ainsi que par l’augmentation de la richesse des ménages. L’investissement des entreprises est soutenu par les conditions de financement favorables, la hausse de leur rentabilité et une forte demande. L’investissement immobilier résidentiel reste robuste. De plus, la croissance largement répartie de la demande mondiale devrait se poursuivre et favoriser les exportations de la zone euro.
La hausse annuelle de l’IPCH dans la zone euro s’est accélérée, s’établissant à 2,0 % en juin, contre 1,9 % en mai, essentiellement en raison de l’augmentation des prix de l’énergie et des produits alimentaires. Sur la base des prix actuels des contrats à terme sur le pétrole, les taux annuels d’inflation devraient fluctuer autour de leur niveau actuel jusqu’à la fin de l’année. Si les mesures de l’inflation sous-jacente restent globalement modérées, elles ont augmenté par rapport aux points bas passés. Les tensions d’origine interne sur les coûts s’accroissent et se généralisent dans un contexte de niveaux élevés d’utilisation des capacités de production et de tensions sur les marchés du travail. L’incertitude autour des perspectives d’inflation recule. Dans la période à venir, l’inflation sous-jacente devrait s’accélérer vers la fin de l’année et progresser graduellement à moyen terme, soutenue par les mesures de politique monétaire de la BCE, la poursuite de la croissance économique, la résorption correspondante de la sous-utilisation des capacités productives et l’accélération de la hausse des salaires.
D’après l’analyse monétaire, la croissance de la monnaie au sens large s’est de nouveau accélérée en juin 2018, après s’être progressivement ralentie depuis le dernier pic enregistré en septembre 2017. Le redressement des prêts au secteur privé se poursuit, sous l’effet principalement des prêts aux sociétés non financières (SNF). L’enquête sur la distribution du crédit bancaire dans la zone euro au deuxième trimestre 2018 montre que la croissance des prêts reste soutenue par l’assouplissement des critères d’octroi du crédit et par la hausse de la demande pour l’ensemble des catégories de prêt. Selon les estimations, les émissions nettes de titres de créance par les SNF de la zone euro ont encore augmenté, tandis que les coûts de financement des SNF sont demeurés favorables.
Compte tenu des résultats de l’analyse économique et des signaux provenant de l’analyse monétaire, le Conseil des gouverneurs a confirmé qu’un degré élevé de soutien monétaire demeurait nécessaire pour assurer la poursuite de la convergence durable de l’inflation vers des niveaux inférieurs à, mais proches de 2 % à moyen terme.
En conséquence, le Conseil des gouverneurs a décidé de laisser les taux d’intérêt directeurs de la BCE inchangés et continue de prévoir qu’ils resteront à leurs niveaux actuels au moins jusqu’à l’été 2019 et, en tout cas, aussi longtemps que nécessaire pour assurer la poursuite de la convergence durable de l’inflation vers des niveaux inférieurs à, mais proches de 2 % à moyen terme. En ce qui concerne les mesures non conventionnelles de politique monétaire, le Conseil des gouverneurs a confirmé que l’Eurosystème continuerait de procéder à des achats nets dans le cadre du programme d’achats d’actifs (asset purchase programme –APP) au rythme mensuel actuel de 30 milliards d’euros jusque fin septembre 2018. Le Conseil des gouverneurs prévoit que, après septembre, si les données lui parvenant confirment ses perspectives d’inflation à moyen terme, le rythme mensuel des achats nets des actifs sera réduit, à 15 milliards d’euros, jusque fin décembre 2018, date à laquelle les achats nets arriveront à leur terme. De plus, le Conseil des gouverneurs entend procéder au réinvestissement des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans le cadre de l’APP pendant une période prolongée après la fin des achats nets d’actifs et, en tout cas, aussi longtemps que nécessaire pour maintenir des conditions de liquidité favorables et un degré élevé de soutien monétaire.
[1] En tenant compte des informations disponibles au moment de la réunion du Conseil des gouverneurs du 26 juillet 2018.
Updated on: 08/09/2018 15:45