La reprise de l’économie de la zone euro se poursuit et la situation sur le marché du travail continue de s’améliorer, en partie sous l’effet du soutien important apporté par les politiques publiques. Cependant, la croissance devrait rester modérée au premier trimestre 2022, la vague actuelle de la pandémie pesant toujours sur l’activité économique. Des pénuries de matériaux, d’équipements et de main-d’œuvre freinent encore la production dans certains secteurs. Le niveau élevé des coûts de l’énergie entame les revenus des ménages de la zone euro ainsi que les bénéfices des entreprises et devrait affaiblir les dépenses de consommation. En revanche, les différentes vagues de la pandémie ont de moins en moins de répercussions sur l’économie, et les facteurs contraignant la production et la consommation devraient s’estomper progressivement, permettant un nouveau net rebond de l’économie au cours de l’année.
L’inflation a fortement augmenté ces derniers mois et a continué de surprendre à la hausse en janvier. Cette évolution s’explique essentiellement par les coûts élevés de l’énergie, qui poussent les prix des biens et des services à la hausse dans de nombreux secteurs, et par le renchérissement des produits alimentaires. L’inflation devrait rester élevée plus longuement qu’anticipé précédemment, mais diminuer en cours d’année.
Le Conseil des gouverneurs a par conséquent confirmé les décisions prises lors de sa réunion de politique monétaire de décembre. En conséquence, le Conseil des gouverneurs continuera de réduire graduellement le rythme de ses achats d’actifs au cours des trimestres à venir et mettra fin aux achats nets dans le cadre du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (pandemic emergency purchase programme, PEPP) à la fin mars. Compte tenu des incertitudes actuelles, le Conseil des gouverneurs doit plus que jamais conserver la flexibilité et n’écarter aucune option dans la conduite de la politique monétaire. Le Conseil des gouverneurs se tient prêt à ajuster l’ensemble de ses instruments, de façon adéquate, pour assurer que l’inflation se stabilise au niveau de la cible de la BCE de 2 % à moyen terme.
L’activité économique mondiale est demeurée solide au quatrième trimestre de l’année dernière. Les données d’enquêtes signalent une croissance économique vigoureuse vers la fin 2021, malgré une croissance toujours faible des échanges commerciaux. Les goulets d’étranglement au niveau des chaînes d’approvisionnement ont montré de timides signes d’atténuation. Toutefois, l’apparition du variant Omicron du coronavirus (COVID-19) et les éventuelles absences de salariés liées à la pandémie pourraient se traduire par de nouvelles perturbations des chaînes d’approvisionnement et faire peser des risques sur l’activité économique mondiale à court terme. L’inflation mondiale a continué d’augmenter, reflétant un renchérissement de l’énergie et une généralisation des tensions sur les prix aux différents secteurs. Les tensions inflationnistes mondiales devraient s’atténuer courant 2022, dans la mesure où les prix de l’énergie devraient se modérer.
La croissance économique de la zone euro s’est ralentie, revenant à 0,3 % en rythme trimestriel au dernier trimestre de l’an dernier. Fin 2021, la production a toutefois atteint son niveau d’avant la pandémie. L’activité économique et la demande devraient rester modérées en ce début d’année, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les mesures d’endiguement de la pandémie ont des répercussions sur les services aux consommateurs, notamment les voyages, le tourisme, l’hébergement et les loisirs. Même si le nombre d’infections est toujours très élevé, les effets de la pandémie sur la vie économique sont désormais moins graves. Deuxièmement, le haut niveau des coûts de l’énergie réduit le pouvoir d’achat des ménages et les bénéfices des entreprises, ce qui pèse sur la consommation et l’investissement. Enfin, les pénuries d’équipements, de matériaux et de main‑d’œuvre dans plusieurs domaines d’activité continuent d’entraver la production de biens manufacturés, de causer des retards dans le secteur de la construction et de freiner la reprise dans certaines parties du secteur des services. Malgré des signes indiquant qu’ils pourraient commencer à s’estomper, ces goulets d’étranglement persisteront quelque temps encore.
Au-delà du court terme, la croissance devrait fortement rebondir dans la zone euro au cours de 2022, sous l’effet d’une solide demande intérieure. Avec l’amélioration de la situation sur le marché du travail (hausse du nombre de personnes ayant un emploi et baisse du nombre de personnes bénéficiant toujours de dispositifs de maintien de l’emploi), les ménages devraient bénéficier de revenus plus élevés et dépenser davantage. La reprise mondiale et le maintien du soutien apporté par les politiques budgétaires et monétaire contribuent également à ces perspectives positives. Des mesures budgétaires ciblées renforçant la productivité ainsi que des réformes structurelles, adaptées à la situation des différents pays de la zone euro, demeurent essentielles pour compléter efficacement la politique monétaire.
L’inflation dans la zone euro a augmenté, ressortant à 5,1 % en janvier 2022, après 5,0 % en décembre 2021. Elle devrait rester élevée à court terme. Les prix de l’énergie demeurent la principale raison de ce niveau élevé, contribuant directement à plus de la moitié de l’inflation totale en janvier, tandis que les coûts de l’énergie poussent également les prix des biens et services à la hausse dans de nombreux secteurs. Les prix des produits alimentaires ont également augmenté, du fait de facteurs saisonniers, des importants coûts de transport et du renchérissement des engrais. En outre, les hausses des prix sont désormais plus généralisées, les prix d’un grand nombre de biens et services s’étant fortement accrus. La plupart des mesures de l’inflation sous-jacente ont augmenté ces derniers mois, même s’il n’est pas certain que ces hausses persistent, car des facteurs temporaires liés à la pandémie ont joué un rôle. Les indicateurs tirés d’instruments de marché suggèrent un ralentissement de la dynamique des prix de l’énergie au cours de 2022, et les tensions sur les prix dues aux goulets d’étranglement mondiaux au niveau de l’offre devraient également s’affaiblir.
L’amélioration de la situation sur le marché du travail se poursuit, bien que la croissance des salaires demeure modérée dans l’ensemble. À terme, le retour de l’économie à son plein potentiel devrait favoriser une hausse plus rapide des salaires. Les mesures des anticipations d’inflation à long terme extraites des instruments de marché sont restées globalement stables à des niveaux légèrement inférieurs à 2 % depuis la précédente réunion de politique monétaire du Conseil des gouverneurs, en décembre, et les dernières mesures tirées d’enquêtes se situent à environ 2 %. Ces facteurs continueront de contribuer à l’inflation sous-jacente et permettront à l’inflation totale de s’établir durablement à la cible de 2 % de la BCE.
Le Conseil des gouverneurs continue d’estimer que les risques pesant sur les perspectives économiques de la zone euro sont globalement équilibrés à moyen terme. L’économie pourrait être plus dynamique qu’attendu si un renforcement de la confiance des ménages entraînait une épargne moins importante qu’anticipé. En revanche, si les incertitudes relatives à la pandémie se sont un peu atténuées, les tensions géopolitiques se sont accrues. De plus, la persistance de coûts élevés de l’énergie est susceptible de freiner davantage que prévu la consommation et l’investissement. Le rythme auquel les goulets d’étranglement au niveau de l’offre se résorberont pèse également sur les perspectives de croissance et d’inflation. Par rapport à ce que le Conseil des gouverneurs anticipait en décembre, les risques pesant sur les perspectives d’inflation sont orientés à la hausse, particulièrement à court terme. Si les tensions sur les prix alimentent des hausses de salaire plus élevées qu’attendu, ou si l’économie retrouve son plein potentiel plus rapidement, l’inflation pourrait être plus forte.
Les taux d’intérêt de marché ont augmenté depuis la réunion du Conseil des gouverneurs de décembre 2021. Cela étant, les coûts du financement bancaire restent limités à ce stade. Les taux d’intérêt des prêts bancaires accordés aux entreprises et aux ménages demeurent à des niveaux historiquement bas, tandis que les conditions de financement de l’économie sont toujours favorables. Les prêts aux entreprises se sont redressés sur l’ensemble des échéances. Une demande soutenue de crédits hypothécaires soutient l’activité de prêt aux ménages. Les banques ont retrouvé un niveau de rentabilité équivalent à celui d’avant la pandémie, et leurs bilans restent solides.
Il ressort de la dernière enquête sur la distribution du crédit bancaire que la demande de prêts des entreprises s’est fortement accrue au dernier trimestre 2021, sous l’effet d’une hausse de leurs besoins en fonds de roulement – en raison des goulets d’étranglement au niveau de l’offre – et d’une augmentation des financements d’investissements à long terme. Par ailleurs, l’évaluation par les banques du risque de crédit reste globalement favorable, essentiellement du fait de leur appréciation positive des perspectives économiques.
Dans ce contexte, lors de sa réunion de politique monétaire de février, le Conseil des gouverneurs a donc confirmé les décisions prises lors de sa précédente réunion, qui s’est tenue en décembre.
Au premier trimestre 2022, le Conseil des gouverneurs ralentit le rythme des achats nets d’actifs au titre du PEPP par rapport au trimestre précédent. Il interrompra les achats nets d’actifs au titre du PEPP fin mars 2022.
Le Conseil des gouverneurs entend réinvestir les remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans le cadre du PEPP au moins jusqu’à la fin de 2024. Dans tous les cas, le futur dénouement du portefeuille PEPP sera géré de façon à éviter toute interférence avec l’orientation adéquate de la politique monétaire.
La pandémie a montré que, en période de tensions, la flexibilité quant aux modalités et à la conduite des achats d’actifs a contribué à remédier à l’altération de la transmission de la politique monétaire et a renforcé l’efficacité des efforts déployés par le Conseil des gouverneurs pour atteindre son objectif. Dans le cadre du mandat du Conseil des gouverneurs, en période de tensions, la flexibilité demeurera un élément de la politique monétaire chaque fois que des menaces sur sa transmission compromettront la réalisation de la stabilité des prix. En particulier en cas de nouvelle fragmentation des marchés due à la pandémie, les réinvestissements au titre du PEPP pourront à tout moment être ajustés de façon souple dans le temps, entre catégories d’actifs et entre les juridictions. Cela pourrait comprendre l’achat d’obligations émises par la République hellénique au-delà des montants provenant du renouvellement des remboursements afin d’éviter toute interruption des achats dans cette juridiction, qui pourrait nuire à la transmission de la politique monétaire dans l’économie grecque alors que celle-ci se remet encore des retombées de la pandémie. Les achats nets au titre du PEPP pourraient aussi reprendre, si nécessaire, pour contrer des chocs négatifs liés à la pandémie.
Conformément à la diminution progressive des achats d’actifs décidée en décembre 2021 et afin que l’orientation de la politique monétaire continue d’aller dans le sens d’une stabilisation de l’inflation au niveau de l’objectif à moyen terme du Conseil des gouverneurs, les achats nets mensuels en vertu du programme d’achats d’actifs (asset purchase programme, APP) seront de 40 milliards d’euros au deuxième trimestre 2022 et de 30 milliards au troisième trimestre. À compter d’octobre, et pendant aussi longtemps que nécessaire pour renforcer les effets accommodants des taux d’intérêt directeurs, le Conseil des gouverneurs continuera d’effectuer des achats nets d’actifs en vertu de l’APP à un rythme mensuel de 20 milliards d’euros. Le Conseil des gouverneurs prévoit de mettre fin aux achats nets peu avant de commencer à relever les taux d’intérêt directeurs de la BCE.
Le Conseil des gouverneurs entend également poursuivre les réinvestissements, en totalité, des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans le cadre de l’APP pendant une période prolongée après la date à laquelle il commencera à relever les taux d’intérêt directeurs de la BCE et, en tout cas, aussi longtemps que nécessaire pour maintenir des conditions de liquidité favorables et un degré élevé de soutien monétaire.
Le Conseil des gouverneurs continuera de surveiller les conditions de financement bancaire et de faire en sorte que l’arrivée à échéance des opérations effectuées dans le cadre de la troisième série d’opérations de refinancement à plus long terme ciblées (TLTRO III) n’entrave pas la transmission harmonieuse de sa politique monétaire. Le Conseil des gouverneurs évaluera en outre régulièrement la contribution des opérations de prêt ciblées à son orientation de politique monétaire. Comme annoncé, il s’attend à ce que les conditions particulières applicables dans le cadre des opérations TLTRO III prennent fin en juin de cette année. Le Conseil des gouverneurs va également évaluer le caractère approprié du calibrage de son système à deux paliers pour la rémunération des réserves, afin que la politique de taux d’intérêt négatifs ne limite pas la capacité d’intermédiation des banques dans un environnement d’excédents de liquidité abondants.
Le Conseil des gouverneurs a également confirmé ses autres mesures en faveur du mandat de la BCE de maintien de la stabilité des prix, à savoir le niveau des taux d’intérêt directeurs de la BCE et les indications sur leur trajectoire future (forward guidance), ce qui est crucial pour conserver le degré adéquat de soutien permettant de stabiliser l’inflation au niveau de l’objectif de la BCE de 2 % à moyen terme.
Le Conseil des gouverneurs se tient prêt à ajuster l’ensemble de ses instruments, de façon adéquate, pour assurer que l’inflation se stabilise au niveau de la cible de la BCE de 2 % à moyen terme.
Mis à jour le : 17/02/2022 10:00