L’inflation annuelle en zone euro, mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), a baissé de 1,1 point en moyenne entre la période 1999-2007, qui a précédé la crise financière, et la période 2013-2019, qui l’a suivie. Les auteurs évaluent les contributions à cette baisse de l’inflation de deux déterminants traditionnels : l’état de la conjoncture économique et la dynamique des prix des matières premières, notamment le pétrole. Ils utilisent pour cela une courbe de Phillips étendue qui prend en compte ces déterminants ainsi que l’impact des mesures de politique monétaire non conventionnelles mises en œuvre depuis 2014. Ils montrent que le caractère désinflationniste depuis 2013 de ces deux déterminants explique l’essentiel de la baisse de l’inflation. Leur contribution moyenne à cette baisse est d’au moins 1 point, compensée à hauteur d’un quart de point par les mesures de politique monétaire non conventionnelles. La part inexpliquée de la baisse moyenne de l’inflation est au plus de 0,3 point.
La faiblesse de l’inflation depuis la crise financière de 2008 est l’une des évolutions macroéconomiques les plus frappantes de la zone euro. L’inflation, mesurée par le glissement annuel de l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), est passée d’une moyenne de 2,1 % sur la période 1999-2007 à une moyenne de 1,0 % sur la période 2013-2019 (cf. graphique 1). Cette baisse de 1,1 point en moyenne entre l’avant et l’après-crise fait l’objet d’un débat renouvelé sur les déterminants de la formation des prix. Outre les facteurs macroéconomiques traditionnels, certaines analyses mettent en avant le rôle d’un possible changement structurel, lié par exemple à la mondialisation et à la numérisation de nos économies.
Cet article propose une décomposition simple de la baisse de l’inflation moyenne en zone euro depuis la crise, permettant de circonscrire le rôle des facteurs traditionnels pris en compte par les modèles existants et d’identifier celui de nouveaux déterminants éventuels, qui nécessiteront le cas échéant d’être étudiés plus avant. Les auteurs utilisent pour cela une courbe de Phillips étendue prenant en compte le prix des matières premières, y compris l’effet indirect du prix du pétrole sur le coût de production des biens et services, ainsi que l’impact des mesures de politique monétaire non conventionnelles mises en œuvre depuis 2014 – achats d’actifs et taux d’intérêt négatifs.
Il apparaît que l’essentiel de la baisse de l’inflation est dû à i) la détérioration de la conjoncture économique, dans le sillage de la double récession subie par la zone euro entre 2008 et 2012, ainsi qu’à ii) la baisse du prix des matières premières, notamment celle du prix du pétrole, après sa forte hausse dans les années 2000. Ces deux facteurs désinflationnistes auraient contribué à diminuer l’inflation annuelle d’au moins 1 point en moyenne depuis la crise, mais leur effet a été compensé pour un quart de point par les mesures de politique monétaire non conventionnelles. La part inexpliquée de la chute de 1,1 point de l’inflation s’élève donc au plus à 0,3 point en moyenne et elle est concentrée sur les années récentes. Outre les facteurs structurels mentionnés plus haut, la baisse de l’inflation pourrait également refléter une dérive des anticipations d’inflation de long terme, l’effet de l’appréciation de l’euro en 2017 et 2018 et la compression des marges dans le secteur des services, qui a absorbé les hausses de salaires depuis 2017.
Mis à jour le : 14/09/2021 17:30