Au cours des années récentes, deux facteurs ont été à l'origine de la dynamique de M3 dans la zone euro : une forte préférence pour la liquidité observée de 2001 à 2003 et suivie d'une normalisation, à un rythme relativement modéré, des comportements de portefeuille ; du côté des contreparties, on note des variations d'amplitude comparable de M3 et des créances nettes sur l'extérieur. Ces facteurs soulignent le rôle des arbitrages nationaux et internationaux de portefeuille dans les évolutions monétaires. En outre, les spécifications traditionnelles de la fonction de demande de monnaie conduisent à des résultats parfois peu satisfaisants : instabilité des coefficients de court et long termes ; écarts relativement importants entre les agrégats estimés et observés ; variation sensible du nombre des relations de long terme. D'où l'idée de construire une fonction de demande de monnaie hors contrepartie extérieure et, alternativement, d'introduire des prix d'actifs financiers dans la fonction de demande de M3 comme l'avait suggéré Friedman (1988).
Au préalable, la relation de base, fondée sur l'équation quantitative de la monnaie, a été réestimée afin de vérifier, par exemple, si l'allongement de la période d'estimation ou la révision de certaines variables n'entraîne pas de modification majeure, notamment en termes de stabilité des paramètres ou du nombre de relations structurelles. Or, cette équation affiche une double instabilité (paramètres et nombre de relations de long terme). La non-prise en compte de la contrepartie extérieure conduit à des résultats similaires. En revanche, l'introduction du cours des actions européennes permet d'obtenir un effet de substitution (coefficient significativement négatif) de cette variable et un meilleur ajustement, sans compromettre les deux relations de long terme (demande de monnaie et relation de Fisher) mises en évidence dans l'article publié dans le Bulletin de la Banque de France n° 111. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, une baisse du rendement boursier européen entraînerait une remontée de l'encaisse réelle et une diminution de la vitesse de circulation de la monnaie. L'évolution des marchés d'actions serait ainsi un facteur explicatif non négligeable de la dynamique de M3 dans la zone euro.
Enfin, des évaluations de l'écart d'encaisses réelles, fondées sur l'équation de demande de monnaie incluant l'effet de substitution du cours boursier européen, font ressortir un excès de liquidité modéré mais persistant dans la zone euro.
Sanvi Avouyi-Dovi, Matthieu Brun, Alain Dreyfus, Françoise Drumetz, Vichett Oung et Jean-Guillaume Sahuc
Mai 2006
Classification JEL : C22, C32, E41.
Mots-clés : demande de monnaie, taux intrinsèque de M3, effet richesse, effet substitution.
Mis à jour le : 11/02/2019 18:00