La part du financement obligataire dans la structure de la dette des entreprises américaines a beaucoup augmenté lors de la Grande Récession tandis que la part de la dette bancaire se réduisait. Cette composition variable dans le temps de la dette des entreprises a été soulignée par Adrian et al. (2012) et Becker et Ivashina (2014) comme un élément essentiel pour comprendre la transmission de la crise financière au secteur non financier. En effet, l’émission de titres sur le marché a aidé les entreprises à pallier la contraction de l’offre de crédit bancaire par les banques en difficulté. Conformément à ces conclusions, la Commission européenne (2014) plaide en faveur du développement de marchés des titres de dette des entreprises afin de compenser la baisse des crédits bancaires lors des récessions 1. Cependant, hormis l’expérience américaine récente, les données macroéconomiques sur le comportement conjoncturel de la structure de la dette des entreprises et son rôle dans les reprises économiques sont relativement rares 2 . Le présent Rue de la Banque se fonde sur les travaux de Grjebine, Szczerbowicz et Tripier (2018) qui proposent une première analyse du comportement de la structure de la dette des entreprises au long du cycle d’activité pour un panel de 23 pays.
La structure de la dette des entreprises varie selon les pays
Avant d’analyser le cycle d’activité, nous présentons une vue d’ensemble de la structure de la dette des entreprises pour un groupe de pays. À cet effet, nous construisons un ratio (la « part obligataire ») qui compare le montant des obligations émises par les sociétés non financières au total des crédits qui leur sont accordés 3. La « part obligataire » est une mesure homogène de la structure de la dette des entreprises dans 23 économies avancées et émergentes, depuis 1989 pour la plupart d’entre elles. Les titres de dette représentent, en moyenne, 17 % du total des crédits accordés aux sociétés non financières au cours de la période considérée. Aux États Unis, le financement obligataire est particulièrement important : les obligations représentaient déjà plus de 50 % de la dette totale des entreprises dans les années 1950 et dépassaient 70 % après la crise récente. Le deuxième pays largement dépendant du financement obligataire est Singapour, avec une valeur moyenne de 40 %, suivi par le Royaume-Uni, avec une valeur moyenne de 22 %. La part du financement obligataire dans la zone euro est beaucoup plus faible et hétérogène. Il représente en moyenne 18 % de la dette des entreprises en France, contre seulement 6 % en Allemagne, 5 % en Italie, 4 % en Espagne et 1 % en Irlande.