La Banque de France et l’ACPR ont conçu un cadre analytique pour quantifier des scénarios de transition climatique et en évaluer les risques financiers associés. Un tel cadre peut être mobilisé pour réaliser des exercices de stress tests climatiques. Une première application de cette approche à la France donne un ordre de grandeur de l’adversité possible des chocs correspondant aux scénarios publiés par le Réseau des banques centrales et des superviseurs pour le verdissement du système financier (NGFS). Il en ressort que, si ces scénarios conduisent à des impacts macroéconomiques modérés à horizon 2050, ils impliquent des transformations structurelles importantes, sources de risques financiers pour les institutions financières particulièrement exposées aux secteurs et aux entreprises les plus affectés. Certaines entreprises verraient leur probabilité de défaut augmenter significativement dans les scénarios de transition désordonnée et le risque de crédit s’accroitre pour les institutions financières exposées.
Le changement climatique pose un défi sans précédent aux économies, et, par ricochet, au système financier. On distingue généralement deux types de risques liés au changement climatique : les risques physiques, associés aux impacts directs du changement climatique (hausse de la fréquence et de la sévérité des évènements climatiques extrêmes), et les risques de transition, liés à la transition plus ou moins ordonnée vers une économie bas‑carbone et les changements économiques structurels associés. À chacune de ces deux familles de risques correspondent différents canaux de transmission à l’économie puis au système financier.
L’augmentation de la fréquence et de la sévérité d’évènements climatiques extrêmes provoquera, par exemple, des destructions d’infrastructures ou d’actifs immobiliers et des perturbations des opérations des entreprises et des acteurs financiers. Celles‑ci nécessiteront des dépenses de réparation ou d’adaptation. Pour les ménages, ces évènements pourront se traduire par des pertes de revenu, par exemple, à travers des effets négatifs sur la productivité du travail, ou de patrimoine, par exemple, en raison de dommages sur des actifs immobiliers. Au niveau macroéconomique, ils entraîneront ainsi une hausse du taux de dépréciation du capital, un besoin d’investissement accru, des perturbations du commerce international, ou encore une réduction des recettes fiscales liées à la baisse de l’activité économique. Au total, le NGFS estime qu’en l’absence de transition, les pertes cumulées des risques physiques atteindraient 13 % de PIB en 2100 au niveau mondial, avec des écarts très importants selon les régions (NGFS, 2021).
Les risques de transition résultent quant à eux des répercussions possibles de la transition vers une économie bas‑carbone. Celle‑ci pourrait en effet engendrer des chocs économiques, avec des implications financières, en particulier si elle était mise en place de manière désordonnée, c’est‑a‑dire, insuffisamment anticipée, mal coordonnée ou retardée. Ces chocs peuvent être de différentes natures. Les politiques climatiques, telles que l’instauration d’une taxe carbone, l’interdiction des véhicules à moteur thermique ou l’obligation de réaliser des travaux d’efficacité énergétique, visent à favoriser des solutions « décarbonées » et à pénaliser des activités émettrices de gaz à effet de serre (GES). Ce faisant, elles ont un impact sur la rentabilité de ces activités et pourraient, par exemple, déclencher des réévaluations brutales des rendements attendus dans certains secteurs, notamment ceux à forte intensité de carbone, en cas de modifications soudaines des anticipations. Certains actifs qualifiés d’ « échoués » (stranded assets) pourraient subir une correction sévère…
Mis à jour le : 28/10/2021 10:00