La croissance du PIB français serait plus robuste qu’attendu en décembre, à 1,9 % en 2018. Puis elle demeurerait au-dessus de son rythme potentiel actuel, à 1,7 % en 2019 et 1,6 % en 2020. La demande intérieure ne ralentirait que légèrement de 2018 à 2020 grâce à la progression soutenue de la consommation des ménages, liée à la fois à la progression des revenus d’activité et aux mesures de baisses des prélèvements obligatoires. L’investissement total demeurerait un moteur de la croissance avec une composition plus équilibrée que ces dernières années. En outre, la croissance française ne serait plus freinée par le commerce extérieur grâce à un fort rebond attendu des exportations en 2018, qui ralentiraient ensuite à l’horizon 2019-2020 du fait d’un environnement extérieur moins favorable (effet retardé de l’appréciation récente du change, demande mondiale moins vigoureuse).
L’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) se redresserait nettement en 2018, à 1,6 % en moyenne annuelle, après 1,2 % en 2017, en particulier sous l’effet de la remontée des prix de l’énergie et des hausses de taxes sur le tabac. Elle évoluerait toutefois avec quelques à-coups, se repliant à 1,4 % en 2019 avant d’augmenter plus franchement en 2020, à 1,8 % en moyenne annuelle.
L’inflation hors produits alimentaires et énergie, comme la hausse du déflateur du PIB, resteraient faibles en 2018, avant de se redresser assez nettement à l’horizon 2020 en lien avec la forte baisse du chômage.
La croissance française resterait soutenue en 2018 à 1,9 %
Après une année 2017 marquée par une forte accélération (2,0 %, après 1,1 % en 2016), l’activité économique continuerait de croître à un rythme soutenu en 2018 (1,9 %). Ce taux de croissance en moyenne annuelle en 2018 traduit un élan passé très fort, visible dans l’important acquis de croissance du PIB à la fin de l’année 2017 (0,9 point de pourcentage – pp), qui se modère ensuite, comme le suggère le récent tassement des enquêtes de conjoncture après leur niveau élevé de 2017. Ces dernières conduisent ainsi à prévoir un début d’année 2018 marqué par une croissance trimestrielle en légère baisse, autour de 0,4 %.
Sur l’ensemble de l’année 2018, la contribution de la demande intérieure à la croissance du PIB se réduirait légèrement. Cependant, après plusieurs années décevantes, et comme le montrent déjà les données disponibles jusqu’à fin 2017, il est attendu un fort rebond de la croissance des exportations et une contribution du commerce extérieur nettement positive en 2018.
En 2019 et 2020, la progression de l’activité se maintiendrait à un rythme supérieur à la croissance potentielle
La croissance de l’activité se stabiliserait à un rythme de l’ordre de 1,6 %-1,7 % par an sur la période 2019-2020. Ce rythme de croissance resterait significativement supérieur à l’estimation actuelle de la croissance potentielle, autour de 1,3 %-1,4 % sur les années de projection. En conséquence, l’écart de production se refermerait en 2019.
Cette projection a été finalisée le 9 mars 2018, après l’estimation ISMA (indicateur synthétique mensuel d’activité) de début mars pour le premier trimestre 2018, elle intègre également les comptes nationaux trimestriels publiés par l’Insee le 28 février 2018. Elle repose par ailleurs sur les hypothèses techniques (cf. tableau A2 en annexe de cette publication) de l’exercice de projection de mars de l’Eurosystème, arrêtées le 14 février 2018. Depuis la prévision publiée en décembre 2017 par la Banque de France, l’évaluation des mesures votées en lois de finances est globalement inchangée. Au-delà, en 2019 et 2020, les effets des réformes récemment entreprises et les orientations de politique économique des prochaines années pourraient avoir un impact supplémentaire sur le rythme de croissance.
Les révisions depuis décembre : plus de dynamisme à court terme
Depuis notre précédente publication de décembre 2017, la prévision de croissance pour 2018 est revue en hausse (+ 0,2 pp). Ceci traduit à la fois un acquis plus fort à la fin de l’année 2017 et des perspectives un peu plus positives qu’anticipé auparavant pour le premier semestre de l’année. Ainsi, la croissance du quatrième trimestre 2017 a été plus élevée qu’attendu (0,6 %, contre 0,5 % attendu en décembre) portant la croissance du PIB en 2017 à 2,0 % (contre 1,8 % attendu en décembre) et l’acquis de croissance du PIB fin 2017 pour 2018 à 0,9 pp (+ 0,1 pp). En outre, le niveau toujours élevé des enquêtes de conjoncture suggère que le rythme du début d’année, même s’il serait en retrait par rapport à fin 2017, pourrait également être légèrement supérieur à nos attentes de décembre. En revanche, avec l’accentuation de l’appréciation du taux de change effectif de l’euro depuis décembre, l’environnement extérieur est un peu moins porteur en mars qu’attendu en décembre. Ceci conduit en particulier à revoir légèrement à la baisse la croissance du PIB en 2019.
Une croissance aux moteurs plus équilibrés : rebond des exportations en 2018 et dynamisme de la demande intérieure tout au long de l’horizon de prévision
Sur l’ensemble de l’horizon de projection, la croissance de l’activité française serait plus équilibrée que sur la période 2016-2017 (cf. graphique 1).
La demande intérieure resterait dynamique. La consommation des ménages accélérerait quelque peu grâce au dynamisme des revenus d’activité, lié à la bonne tenue de l’emploi et au redressement des salaires. En outre, les mesures fiscales votées en lois de finances soutiendraient le revenu des ménages à partir de fin 2018. Une partie de ces gains contribuerait toutefois à la remontée du taux d’épargne. L’investissement des entreprises se modérerait graduellement après sa forte progression de 2016 et 2017. Il resterait néanmoins soutenu par la vigueur de l’activité et le niveau relativement bas des taux d’intérêt et continuerait ainsi à croître nettement plus vite que le PIB. Comme suggéré par les indicateurs de ventes et de mises en chantier de logements, l’investissement des ménages ralentirait en 2018, puis progresserait sur un rythme proche de celui du pouvoir d’achat des ménages.
La contribution du commerce extérieur serait nettement positive en 2018. Comme attendu en décembre, les exportations ont nettement accéléré fin 2017 et l’acquis de croissance pour l’année 2018 est déjà élevé (2,8 pp). Elles resteraient soutenues par le dynamisme de la demande mondiale, même si celle-ci perdrait progressivement en vigueur d’ici à 2020 ; les effets de l’appréciation du change enregistrée depuis l’été 2017 se feraient également progressivement sentir. La contribution du commerce extérieur redeviendrait ainsi neutre en 2019 et 2020.
Enfin, la contribution des stocks à la croissance, très positive en 2017 et en moyenne depuis plusieurs années, deviendrait négative en 2018, ainsi que le suggère l’acquis à la fin de l’année 2017. Elle serait ensuite neutre sur l’horizon de prévision.
Le taux de chômage atteindrait un peu moins de 8,0 % fin 2020, au plus bas depuis fin 2008
Les créations nettes d’emploi ont été très soutenues en 2017 (+ 276 000) et elles resteraient dynamiques sur l’horizon de prévision, en se maintenant sur un rythme de l’ordre de + 180 000 à + 200 000 par an, malgré la réduction du nombre d’emplois aidés en 2018. En 2019 et 2020, les créations d’emplois marchands seraient soutenues par la transformation du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) en allègements de cotisations sociales employeurs, mais elles seraient toutefois un peu moins vigoureuses que les années précédentes, du fait du ralentissement de l’activité. Le taux de chômage baisserait continûment pour atteindre 7,9 % au dernier trimestre 2020, son plus bas niveau depuis fin 2008. Par rapport à nos prévisions de décembre, la surprise a été particulièrement forte concernant le taux de chômage du quatrième trimestre 2017, qui s’établit à 8,9 % au lieu de 9,6 % attendu. Sous l’hypothèse d’un contrecoup limité début 2018, ceci conduit à réviser nettement en baisse la trajectoire prévue du taux de chômage sur tout l’horizon de prévision.
L’inflation française totale connaîtrait des à-coups en 2018 et 2019, avant de se redresser de façon substantielle en 2020, vers 1,9 % en fin d’année
L’inflation IPCH accélérerait nettement en 2018 (1,6 %, après 1,2 % en 2017, cf. graphique 2), avant de se replier de façon transitoire en 2019 (1,4 %). Le regain de 2018 serait en effet accentué par l’augmentation des prix de l’énergie d’une part, y compris les tarifs du gaz et de l’électricité, et par l’effet des mesures fiscales sur le tabac d’autre part. En revanche, l’inflation hors énergie et alimentaire se redresserait encore très peu en 2018 (0,7 %, après 0,6 % en 2017). En 2019, la baisse de l’inflation d’ensemble masquerait au contraire la remontée progressive de l’inflation hors énergie et alimentaire (1,2 % en 2019), en lien avec la baisse du taux de chômage et une certaine accélération des salaires. Ce mouvement se confirmerait en 2020, avec une progression de 1,5 % des prix hors énergie et alimentaire et de 1,8 % pour l’indice d’ensemble en moyenne annuelle.
Dans le détail, la hausse des prix des produits manufacturés resterait contenue jusqu’en 2019, en raison des effets de l’appréciation récente du change qui contrecarreraient l’accélération de l’emploi et des salaires. La progression des prix des services resterait faible en 2018, avec notamment la baisse des loyers dans le secteur HLM attendue en avril. Elle se redresserait en 2019 et 2020, dans le sillage d’une légère accélération des salaires avec la baisse du taux de chômage.
Ces perspectives restent sujettes à des aléas, qui sont toutefois équilibrés
Les aléas sont jugés équilibrés pour la projection du PIB réel. Si de nombreux éléments suggèrent que la croissance de l’investissement privé (ménages et entreprises) a atteint un pic en 2017, son ralentissement pourrait être plus tardif ou de moindre ampleur qu’attendu dans notre prévision. Par ailleurs, les réformes en cours et à venir pourraient se traduire par un supplément de croissance potentielle avant la fin de la période de projection. À l’inverse, l’ajustement des exportations à l’appréciation du change et les aléas sur le scénario de demande mondiale constituent des risques baissiers. Enfin, le tassement de certains indicateurs conjoncturels depuis janvier pourrait également suggérer un rythme de croissance plus faible qu’attendu en début d’année 2018.
Les aléas semblent également équilibrés en ce qui concerne la projection de l’inflation. Pour le court terme, la prévision incorpore une baisse des loyers dans le parc social comme prévu en lois de finances au 1er avril 2018 ; toutefois, son ampleur et l’éventualité d’un rattrapage des mois précédents sont incertaines. Si la correction à la hausse du taux de chômage début 2018 était plus marquée qu’attendu, l’inflation pourrait être plus faible que prévu en 2018. Inversement, le repli du prix du pétrole anticipé dans les cours à terme pourrait ne pas se matérialiser, ce qui constituerait un aléa à la hausse pour la projection de l’inflation. Enfin, les réformes sur le marché du travail ont un impact incertain sur l’inflation.
Mis à jour le : 16/05/2018 10:41