Du fait de l’épidémie de Covid-19, notre projection centrale est sujette à un niveau d’incertitude nettement supérieur à celui entourant les prévisions en temps normal. Cet encadré présente donc deux scénarios alternatifs en comparaison avec notre scénario central, reflétant des dynamiques « favorable » et « sévère » de l’évolution de la situation épidémique (cf. graphique 3). Ces scénarios alternatifs sont le résultat de simulations réalisées à l’aide de notre modèle de prévision FR-BDF, construites à partir d’une combinaison de chocs spécifiques aux différents scénarios sur la demande domestique comme extérieure, ainsi que des hypothèses alternatives sur certaines variables financières. Comme en juin, ces scénarios ont été établis dans le cadre de la préparation des projections communes de l’Eurosystème pour décembre 2020 ; elles reposent ainsi sur une approche coordonnée, avec des scénarios analogues publiés par la Banque centrale européenne et les banques centrales nationales.
Dans le scénario favorable, nous supposons que dans l’ensemble du monde la situation sanitaire s’améliorerait rapidement et nettement dès le début de 2021. De plus, nous faisons l’hypothèse qu’une solution médicale efficace, telle que la mise sur le marché de vaccins, serait trouvée dès le début 2021 et suivie d’un déploiement assez rapide et généralisé au cours de l’année. Un tel scénario permettrait une reprise nette de l’activité en France et dans le monde. Réagissant au succès des mesures de santé publique qui se traduirait par une levée plus rapide des mesures restrictives et une baisse de l’incertitude, les ménages augmenteraient rapidement et de façon significative leurs dépenses et réduiraient ainsi nettement leur taux d’épargne, tandis que les perspectives d’investissement s’éclairciraient de manière substantielle. Ainsi, après la dégradation à la fin 2020, l’économie suivrait une reprise en « W » et le PIB reviendrait à son niveau d’avant la crise dès la fin 2021. Après un recul toujours marqué en 2020, le rebond en 2021 et 2022 serait fort, de 7 % puis de 5 % (cf. tableau infra). Dans ce scénario, nous considérons que la pandémie n’aurait pas d’effet de long terme sur le PIB potentiel. Et l’inflation reprendrait un peu plus franchement après son très bas niveau de 2020, pour atteindre 1,2 % à la fin 2023. Dans ce contexte, la dette publique reculerait lentement sur l’horizon de prévision à un niveau proche de 110 % du PIB en 2023.
Dans le scénario sévère, nous supposons que le virus continuerait de circuler en France et dans le monde en 2021 et 2022, avec un haut niveau de virulence. Des mesures sanitaires contraignantes resteraient nécessaires, dont certaines seraient maintenues jusqu’au début 2023. Malgré les premiers résultats sur les vaccins, nous supposons que la mise en place d’un déploiement large serait finalement lente et n’atteindrait pas un niveau suffisant avant le début 2023. Après la forte baisse du PIB en 2020, des périodes étendues ou répétées de confinement ainsi qu’une incertitude économique élevée continueraient de peser sur les dépenses des ménages et des entreprises et se traduiraient par une poursuite de la détérioration au premier semestre 2021. De plus, la multiplication des défaillances d’entreprise en 2021 handicaperait la capacité de rebond de l’économie et se traduirait par une perte importante de PIB potentiel. Dans ce scénario, l’activité ne se redresserait pas en 2021 (– 1 %). De plus, la reprise en 2022 resterait progressive et contrainte par des perturbations durables sur les chaînes de valeur et un haut niveau d’incertitude économique. Du fait d’une activité économique qui serait très durablement réduite, l’inflation deviendrait négative en 2021 et 2022. Les pressions déflationnistes prévaudraient malgré des rigidités nominales à la baisse sur les salaires et les prix. Dans ce contexte, la dette publique dépasserait 130 % du PIB à partir de 2021 et augmenterait fortement jusqu’à atteindre à un niveau proche de 140 % du PIB en 2023.
En comparaison de nos projections de juin, nos deux scénarios alternatifs sont un peu plus proches du scénario central. Ceci est lié à une moindre incertitude concernant la dynamique de court terme de l’économie, qui reflète une forme d’apprentissage depuis mai dernier concernant notre compréhension des effets des mesures sanitaires sur l’économie, au moins à court terme.