La dette des entreprises engendre un coût lié au paiement des intérêts. Ce coût varie en fonction du niveau des taux d’intérêt de marché, d’autant plus rapidement que la dette est à taux variable ou à maturité courte. Les sociétés non financières résidant en Italie et en Espagne présentent une proportion de dette à taux variable et à court terme plus importante que celles résidant en France et en Allemagne ; elles seront donc exposées plus tôt au coût de la hausse des taux d’intérêt réalisée sur 2022. Dans une hypothèse de hausse des taux avec stabilité de l’encours de dettes, les taux d’intérêt moyens des entreprises de ces quatre pays continueraient d’augmenter progressivement, à des rythmes différents. Ces résultats reposent sur des données détaillées, couvrant entre 49 et 65 % de la dette consolidée des entreprises selon leur pays de résidence.
Une hausse des taux d’intérêt telle que celle amorcée en 2022 pèse sur les comptes des acteurs économiques en besoin structurel de financement, notamment l’État et les entreprises. La mesure précise du poids de cette hausse, qui pourrait constituer une vulnérabilité pour la stabilité du système financier, dépend non seulement du volume total de dette contracté, mais aussi de sa structure (maturité, répartition entre taux fixe et taux variable) et de sa vitesse de renouvellement.
Cet article s’appuie sur les données détaillées – contrat par contrat – collectées par l’Eurosystème pour reconstituer la structure de la dette agrégée des sociétés non financières (SNF, désignées ci après par « entreprises ») résidentes des quatre plus grandes économies européennes au 31 décembre 2021. Ces données permettent d’établir une projection de l’augmentation du coût de cette dette sur plusieurs années selon l’évolution des taux d’intérêt.
L’exploitation de ces données permet de constater que la hausse des taux d’intérêt de marché intervenue entre janvier et juin 2022 touchera plus rapidement les entreprises italiennes et espagnoles que les entreprises françaises et allemandes. Dans le cas où cette hausse s’accentuerait de + 2 % entre juin et décembre 2022, les taux d’intérêt moyens des dettes des entreprises de ces quatre pays continueraient d’augmenter progressivement à l’horizon 2026. Ils atteindraient + 2,3 % en France et en Allemagne, voire + 2,5 % en Italie et + 2,7 % en Espagne, par rapport à janvier 2022. Ces écarts de comportement proviennent de différences entre des structures de dettes à maturité longue et à taux principalement fixe (entreprises françaises et allemandes), dont le coût réagit lentement aux variations de taux, et des structures de dettes à taux plus variable (entreprises italiennes et espagnoles), aux incidences plus rapides sur le coût.
Dans le détail, l’étude porte sur les encours de dette suivants :
• les crédits bancaires octroyés aux entreprises par les banques de la zone euro, déclarés par les banques dans la base AnaCredit, dès lors que leur exposition au débiteur dépasse 25 000 euros ;
• les titres de dette émis par ces entreprises, documentés dans la Centralised Securities Database (CSDB) dès lors qu’ils ont été émis ou sont détenus en zone euro.
Grâce à ces informations, il est possible d’établir une projection de l’évolution de ce passif payeur d’intérêts sous des hypothèses simples de renouvellement de dette, puis de calculer le taux moyen correspondant en fonction de scénarios d’évolution future des taux d’emprunt.
Mis à jour le : 02/12/2022 10:47