Les notations de crédit sont un point de référence dans le cadre réglementaire bancaire et assurantiel. Bien que la littérature semble conclure au caractère procyclique des notations de crédit, cette procyclicité reste néanmoins limitée au regard des méthodes alternatives d’évaluation du risque de crédit (écart de taux, couvertures de défaillance). Une analyse empirique de la sensibilité des exigences de fonds propres des six plus grandes banques françaises à l’évolution des notations de crédit de leurs portefeuilles entreprises suggère que la vague de dégradation de notations courant 2020 ne s’est pas matérialisée par une hausse sensible des pondérations moyennes et des actifs pondérés des risques. La prépondérance du recours aux modèles de notations internes par les grandes banques françaises, la forte prévalence des expositions non notées, pondérées par défaut à 100 %, et les prêts garantis par l’État ont contribué à atténuer l’impact des dégradations de notations externes sur les pondérations en risque.
Qu’entend-on par procyclicité ?
En référence au concept d’accélérateur financier de Bernanke et al. (1996), la procyclicité peut se définir ici comme la propension des évolutions endogènes des marchés du crédit à propager et amplifier les effets de chocs initiaux réels ou monétaires. Ce mécanisme est dû aux imperfections dans la réalisation des échanges et la conclusion des contrats sur les marchés de capitaux, en particulier les asymétries d’information entre créanciers et emprunteurs et la relation de principal-agent associée. Ces asymétries expliquent que la prime payée par les entreprises lorsqu’elles se financent sur les marchés de crédit (en comparaison du financement interne par fonds propres) est plus grande quand la valeur ou richesse nette de l’emprunteur est plus faible. Ainsi, quand la valeur nette des emprunteurs fluctue avec le cycle économique, par exemple du fait de la procyclicité des bénéfices et des prix des actifs, la prime de financement externe est contracyclique : la baisse de la valeur nette qui suit la baisse du prix des actifs augmente la prime de financement externe. Cela amplifie donc les effets d’un choc initial pesant sur la production, la consommation ou l’investissement. À la suite de la crise des subprimes et de celle des dettes souveraines européennes, les notations de crédit ont fréquemment été accusées d’être procycliques, dans la mesure où un abaissement de notation peut, au travers du canal de l’accélérateur financier, augmenter les coûts de financement externes d’une entreprise ou d’un État et ainsi amplifier la détérioration de sa solvabilité. Les nombreuses difficultés méthodologiques relatives à la notation des emprunteurs ont conduit les autorités à réduire la dépendance mécanique de la réglementation financière aux évaluations de ces entités.
La question de la procyclicité des notations externes nécessite ainsi une compréhension des méthodes d’attribution des notations par les agences et de leur prise en considération du cycle des affaires. Il convient tout d’abord de distinguer la procyclicité des méthodes, ou politiques de notations (impliquant des standards plus stricts en période de récession qu’en période d’expansion), de la procyclicité des notations elles-mêmes : l’observation d’un plus grand nombre de dégradations de notations en période de récession qu’en période d’expansion n’est pas nécessairement la preuve d’une politique de notation procyclique. En effet le risque de crédit augmente mécaniquement en période de récession. Enfin, une troisième source de procyclicité concerne…
Mis à jour le : 21/03/2023 11:33