En 2010, la contribution économique territoriale (CET) a remplacé la taxe professionnelle. Cet impôt de production était souvent critiqué, car il pesait sur la compétitivité et sur la productivité des entreprises, en raison notamment de son assiette intégrant le capital non immobilier. Depuis, ce dernier est exclu de l’assiette de la nouvelle contribution. Cet article évalue les effets de la réforme qui a constitué un choc important pour les entreprises, dont l’activité a augmenté en conséquence. Alors que le passage à la CET a réduit le coût marginal de l’investissement en équipements, l’intensité capitalistique des entreprises n’a pas augmenté pour autant, la hausse de l’emploi ayant été à peu près proportionnelle à celle de l’investissement. Mais, en diminuant l’hétérogénéité des taux d’imposition (source de variation du coût du capital sur le territoire), la réforme a ouvert aux entreprises la possibilité de mieux allouer leurs facteurs de production et d’améliorer leur compétitivité.
La France se distingue depuis longtemps par un niveau élevé d’impôts sur la production. Ces impôts représentaient par exemple 3,6 % de la valeur ajoutée des entreprises en 2016, contre 0,5 % en Allemagne, plaçant la France au deuxième rang européen du plus haut niveau de prélèvement pour ce type d’impôts, après la Grèce (Martin et Trannoy, 2019). Pourtant, ces impôts sont généralement jugés nocifs pour l’économie en raison des distorsions qu’ils engendrent tout au long de la chaîne de production. En effet, ils influencent le mode de production des entreprises, en pénalisant leur productivité et leur compétitivité. Depuis le début des années 2000, les gouvernements successifs ont souhaité diminuer leur poids, comme l’illustrent notamment les réformes de la taxe professionnelle (TP) qui se sont succédé. Cet article s’intéresse aux conséquences de la suppression de cette taxe et de son remplacement par la contribution économique territoriale (CET).
La taxe professionnelle avant 2010
La TP a été mise en place par la loi du 29 juillet 1975, qui supprime en même temps la patente (instaurée à la fin du xviiie siècle). À l’origine, la TP était assise sur une assiette composite comprenant : i) les recettes de l’entreprise ; ii) la valeur locative foncière (VLF) des biens passibles. de taxe foncière ; iii) la valeur locative des équipements et biens mobiliers (EBM) ; et iv) les salaires. En 2003, pour contrer les effets délétères de la TP sur l’emploi, la composante salariale a été exclue de l’assiette.
Jusqu’en 2009, les trois bases d’imposition − recettes, VLF et EBM − pouvaient se cumuler selon une combinatoire complexe (cf. tableau 1), entraînant parfois d’importants effets de seuil. L’assiette de droit commun pénalisait l’investissement, car la valeur locative des EBM, ainsi que celle des établissements industriels redevables de la taxe foncière, étaient directement fonction de leur prix de revient. La TP affectait particulièrement les secteurs à forte intensité capitalistique (ceux dont le ratio investissement sur valeur ajoutée est le plus élevé), et ce malgré son plafonnement. Les secteurs de l’industrie, de l’énergie et des transports supportaient près de 66 % de la charge de la TP, alors qu’ils représentaient moins de 35 % du bénéfice fiscal de l’ensemble des sociétés.
Les taux marginaux étaient fixés par les différentes collectivités territoriales (communes, communautés de communes, départements et régions)…
Mis à jour le : 02/12/2021 10:09