Le Bulletin de la Banque de France n°242 : Article 6 La transmission des variations du taux de change aux prix des importations en France : le rôle des monnaies de facturation

Le dollar américain est largement utilisé dans le commerce mondial pour faciliter les transactions internationales. En France, près de 60 % des importations françaises extracommunautaires sont facturées en dollars US chaque année. Ainsi, la prise en compte de la facturation en dollars US dans les transactions internationales peut conduire à modifier l’évaluation de la transmission des mouvements du taux de change aux prix des importations. En particulier, la dépréciation du taux de change effectif nominal (TCEN) depuis janvier 2021 est plus forte lorsque celui-ci est calculé en utilisant le poids des monnaies de facturation plutôt que le poids des échanges bilatéraux. Dans cet épisode où l’euro se déprécie davantage vis-à-vis du dollar US que des autres monnaies, les mesures conventionnelles du TCEN fondées sur les pondérations par les flux commerciaux bilatéraux ont tendance à sous-estimer la transmission du choc de taux de change aux prix à l’importation.

1 La transmission des mouvements du taux de change aux prix à l’importation

L’ampleur de la transmission du taux de change aux prix des biens exportés et importés, le « pass-through » du change, présente un grand intérêt pour la mise en oeuvre des politiques économiques. Elle détermine notamment l’ajustement de la balance commerciale et du compte courant aux chocs extérieurs. Elle se répercute également sur l’inflation, dans la mesure où les prix à la consommation sont en partie influencés par les prix des biens importés et ces derniers, à leur tour, dépendent entre autres des mouvements du taux de change.

La prise en compte des monnaies de facturation est importante pour analyser cette transmission. Lorsque les biens importés sont facturés dans la monnaie de l’exportateur, la dépréciation du taux de change de l’importateur rend les biens importés plus chers en monnaie locale. En revanche, lorsque les prix sont facturés dans la monnaie de l’importateur, ils ne varient pas à court terme et sont qualifiés de « rigides ». Autrement dit, la dépréciation du taux de change influe peu sur le prix des biens importés. La facturation des transactions internationales dans une monnaie « véhicule », par exemple le dollar américain (US) – lorsque ni l’exportateur ni l’importateur ne sont localisés aux États-Unis –, modifie également la transmission des chocs de taux de change aux prix à l’importation (Gopinath et Itskhoki, 2021).

Enfin, la composition des monnaies de facturation compte également si l’on souhaite quantifier les effets des mouvements du taux de change dans les prix à l’importation d’un point de vue macroéconomique. Le dollar US joue un rôle dominant dans les transactions internationales : dans le cas de la France, près de 60 % des importations, hors Union européenne (UE) à 27 et hors Royaume-Uni, sont facturées en dollars US alors que les États-Unis représentent 15,6 % de nos importations en 2019 sur le même périmètre. Ainsi, les variations du taux de change de l’euro vis-à-vis de la monnaie américaine peuvent conduire à des variations du prix des biens importés, y compris lorsque ceux-ci ne proviennent pas des États-Unis.

Dans cet article, nous nous intéressons à la période qui, depuis janvier 2021, a été marquée par la forte dépréciation de l’euro vis-à-vis du dollar US (dépréciation de 21,6 % au 27 septembre 2022). L’analyse se concentre sur le rôle des monnaies de facturation dans la transmission des mouvements de taux…

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Le Bulletin de la Banque de France n°242 : La transmission des variations du taux de change aux prix des importations en France : le rôle des monnaies de facturation
  • Publié le 21/10/2022
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Mis à jour le : 21/10/2022 10:04